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Le groupe Fontaines D.C. et sa « romance » moderne

Sur les hauteurs du quartier de Belleville, les bureaux du label Beggars/XL Recordings sont inhabituellement en ébullition. Quelques membres de la délégation rock irlandaise Fontaines D.C. ont fait le déplacement à Paris pour promouvoir leur quatrième album. Leur nouveau-né s’intitule Romance, mais, aujourd’hui, un autre bébé leur vole la vedette : elle se nomme Vega, une puce âgée d’à peine 9 mois, qui n’est autre que la fille du guitariste Carlos O’Connell. Les attachés de presse s’improvisent baby-sitters pendant que papa donne des entretiens dans la pièce d’à côté, et jette régulièrement un coup d’œil à travers la porte.
A quelques mètres de là, le chanteur, Grian Chatten, s’évade sur les touches d’un piano droit. La mélodie jouée, délicate, contraste avec le tee-shirt « Torture Killer » qu’il porte, un groupe de death metal finlandais. Le tout jeune trentenaire, dont la coupe de cheveux courte et le regard bleu intense lui donnent de faux airs d’Ian Curtis (1956-1980), de Joy Division, prétend toutefois être un pianiste limité et se considère avant tout guitariste. « Lors de ce genre de journée promotionnelle, avoir un instrument à proximité est une respiration, confie l’auteur-compositeur et interprète. Cela permet de se reconnecter avec soi-même, de se rappeler pourquoi on fait tout ça. Composer en permanence est bon pour moi, et c’est certainement la raison pour laquelle nous sommes si prolifiques. »
En l’espace de quatre albums sortis en cinq ans, le quintette dublinois, formé, en 2017, par Grian Chatten, Carlos O’Connell (guitare), Conor Curley (guitare), Conor Deegan (basse) et Tom Coll (batterie), n’a effectivement pas chômé. Auteurs d’un fulgurant baptême du feu, Dogrel (2019), suintant l’urgence postpunk des aînés The Only Ones et The Fall, les Irlandais ont enchaîné les suites impeccables, A Hero’s Death (2020) et Skinty Fia (2022). Assimilés, à leurs débuts, à une scène rock alternative aux côtés de Idles, Shame, Fat White Family et Sleaford Mods, les nouveaux fontainiers de la mélancolie ont vite gravi les échelons de la popularité. Cet automne, l’Europe les attend dans de grandes salles d’une capacité de 10 000 places, et le concert du 13 novembre, à Paris, sera aussi leur premier Zénith (6 800 places).
Mieux que n’importe quelle autre formation rock anglaise d’aujourd’hui, Fontaines D.C. a su prendre le pouls de sa génération désenchantée. Grian Chatten dépeint avec ses mots crus une société aliénante et individualiste, rongée par le capitalisme, le tout emporté dans une spirale climatique dévastatrice. « No future », clamaient déjà les Sex Pistols en 1977 ; même constat en 2024 pour le quintette irlandais, y ajoutant un zeste de « romance » moderne.
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